Youtube est encore et toujours un hébergeur au sens de la LCEN

10 juin 2012 - NOUVELLES TECHNOLOGIES

TF1 vient de perdre sa bataille entamée en mars 2008 contre le site de partage de vidéos en ligne YouTube. TF1 demandait en effet plus de 140 millions d’euros de dédommagements à YouTube pour la mise en ligne de vidéos sur lesquelles il détient des droits.

Par un jugement en date du 29 mai 2012, le TGI de Paris a débouté TF1 de l’intégralité de ses demandes et a, par ailleurs, reprécisé le statut du site participatif au regard de la LCEN.

TF1 souhaitait voir reconnaître le statut d’éditeur de YouTube car il estimait que son rôle ne se limitait pas à celui d’un prestataire purement technique. Les arguments mis en avant par TF1 pour démontrer que YouTube joue un rôle actif sur les contenus mis en ligne par les internautes étaient les suivants :

YouTube procède à une modération a priori afin de censurer les contenus qu’elle estime non conformes à la ligne éditoriale du site ; YouTube promeut les contenus qu’elle juge les plus attractifs en les sélectionnant et en les mettant en avant auprès des internautes qui visitent son site.

Le TGI a débouté TF1 de ses demandes et a répondu à ses arguments de la manière suivante :

Le tribunal estime qu’aucun contrôle des vidéos n’est fait a priori ou a posteriori par YouTube autre que celui imposé par le texte et relatif à la détection des vidéos concernant les actes de pédophilie, de crime contre l’humanité et d’incitation à la haine raciale. Le fait que l’internaute ait la possibilité d’avoir accès à des vidéos classées dans des rubriques « vidéos visionnées en ce moment », « sélection vidéo », « les plus populaires »… n’est que le résultat de statistiques calculées par un logiciel sur le site de YouTube. En agissant de la sorte, YouTube ne promeut pas les contenus les plus attractifs mais indique simplement les contenus les plus demandés.

TF1 n’a donc pas réussi à faire établir que YouTube aurait un rôle éditorial ou aurait développé une ligne éditoriale pour son site.

Le Tribunal en conclu que YouTube bénéficie du statut d’hébergeur en vertu de l’article 6 de la LCEN et qu’elle n’a donc aucune obligation de contrôle ou de filtrage préalable du contenu des vidéos.

Elle a, par ailleurs, rempli sa mission d’information des internautes puisqu’elle a mis en place un système d’alerte et de signalement des contenus illicites et qu’elle a averti les internautes qu’ils ne peuvent proposer aucun contenu protégé sans avoir obtenu l’autorisation préalable pour le faire.

Enfin, le Tribunal constate que YouTube a mis en place un programme « Content ID » permettant aux titulaires de droits d’obtenir, après notification du contenu, le retrait définitif de la vidéo notifiée comme litigieuse. Ce faisant, YouTube a rempli son obligation en donnant aux titulaires de droits les moyens de voir leurs œuvres réellement protégées. TF1 a d’ailleurs conclu avec YouTube un accord le 16 décembre 2011 pour avoir accès à ce programme.

Ce jugement du TGI de Paris n’est pas surprenant au regard de la jurisprudence établie depuis quelques années autour du statut d’hébergeur. Il convient en effet de rappeler que YouTube avait déjà bénéficié du statut d’hébergeur dans un jugement rendu par le TGI de Paris en 2008 (Lafesse et a. c/ Sté Youtube et a.). Par ailleurs, le statut d’hébergeur a été reconnu par la Cour de cassation pour le site concurrent de YouTube, Dailymotion, dans un arrêt du 17 février 2011.

Il est clair que désormais, et plus que jamais, la coopération entre les ayants droits et les plateformes de diffusion doit se perfectionner. Une nouvelle ère de collaboration devra remplacer les actions contentieuses afin d’optimiser la monétisation des contenus. L’ASIC (Association des Sites Internet Communautaires) a appelé, en ce sens, à un rassemblement des différents acteurs autour du développement d’une offre légale riche sur les plateformes communautaires de vidéos.

mentions legales