La communication par Facebook de son premier rapport financier en août 2012 a révélé que 8.7% des profils existants sont faux (soit près de 83 millions de profils sur les 955 millions d’utilisateurs que compte le réseau social).
Si l’ampleur du phénomène est bien réelle et pas uniquement circonscrite au réseau Facebook, les conséquences juridiques de la création de faux profils n’en sont pas moins concrètes, tant sur le plan pénal que civil.
Au mois de novembre 2012, une affaire de faux profil a été jugée sous l’angle du délit pénal de diffamation prévu par l’article 29 de la loi du 29 juillet 1881 (TGI de Bobigny, 14e chambre correctionnelle, jugement du 15 novembre 2012).
Un ancien salarié de la société MMA avait créé, sur le réseau social professionnel Viadeo, un faux profil au nom de son ancien supérieur, qu’il tenait pour responsable de son licenciement. La page ainsi créée contenait des imputations diffamatoires à l’encontre de l’employeur de ce salarié.
Rappelons que l’article 65 de la loi précitée prévoit un délai de prescription de 3 mois à compter de la publication des propos diffamatoires, au-delà duquel aucune action ne peut plus être intentée contre l’auteur de ces propos.
Le prévenu avait tenté d’arguer qu’au moment de la plainte, les faits qui lui étaient reprochés étaient prescrits. La fiche litigieuse ayant été mise en ligne le 3 mars 2010, cette date constituait selon lui l’unique point de départ du délai de prescription de 3 mois précité.
Toutefois, le Tribunal a considéré que l’actualisation de la fausse fiche, intervenue le 17 mars 2010, avait pour conséquence d’ouvrir un nouveau délai de prescription de 3 mois à compter de cette date. Les faits n’étant dès lors pas prescrits au moment de la plainte, le Tribunal a déclaré le prévenu coupable des faits de diffamation qui lui étaient reprochés.
En conséquence, le prévenu a été condamné avec sursis au paiement d’une amende de 1000 euros, ainsi qu’au paiement de la somme de 1euros à son ancien supérieur, ainsi qu’à la société MMA, au titre de leur préjudice moral respectif.
Dans le même sens, une précédente affaire de faux profil avait été jugée en 2010, cette fois-ci sous l’angle du droit civil.
Un internaute avait créé un faux profil au nom d’ Omar Sy, accessible à tous les membres de Facebook. La page, illustrée de photographies de l’artiste, laissait penser qu’il s’agissait du compte authentique de l’humoriste et recevait ainsi de nombreuses demandes d’utilisateurs qui pensaient s’adresser directement à Omar Sy.
L’artiste, considérant que ce faux profil parasitait sa vie privée, a intenté une action civile à l’encontre de l’internaute (et non de Facebook) pour violation de sa vie privée et de son droit à l’image.
Dans son jugement du 24 novembre 2012, le Tribunal de Grande Instance de Paris a considéré qu’aucun élément ne justifiait que des informations concernant les goûts ou l’identité de certains amis de l’humoriste soient portées à la connaissance du public en se fondant sur l’article 9 du Code civil. De même, l’internaute n’était pas en droit de publier des photographies d’Omar Sy, sans son consentement, pour illustrer un site portant atteinte à sa vie privée.
Identifié grâce à son adresse IP communiquée par son fournisseur d’accès internet, l’internaute a alors été condamné à payer 1500 euros à Omar Sy en réparation du préjudice causé à ce dernier du fait des atteintes à l’image et à la vie privée engendrées par la création de cette fausse page Facebook.
Ce raisonnement peut bien entendu être transposé à tous les sites de partage tels que LinkedIn, Viadeo et Twitter.
La lutte contre l’usurpation d’identité est désormais efficace.