Créatifs et créateurs salariés, pourquoi le contrat de travail ne suffit pas?

1 avril 2015 - DROIT D'AUTEUR

Une œuvre de l’esprit, qu’elle ait été ou non créée par le salarié au sein de la société qui l’emploie, appartient à son créateur (article L.111-1 du Code de la propriété Intellectuelle).

Aussi étonnant que cela puisse paraître, même si la mission du salarié est de créer (des dessins, des croquis, des visuels, des patronages),  ses droits d’auteur restent sa propriété.

L’exception réside dans la notion d’œuvre collective. Si l’œuvre de l’esprit est créée par une équipe et sous l’impulsion de l’employeur ou d’un directeur artistique, mais surtout, si la société est capable de fournir des preuves écrites des instructions qui ont été données, les droits d’auteur appartiendront à la personne morale.

Ainsi, si les orientations d’une collection sont clairement dictées par l’esprit d’une marque, les créations des salariés pourraient appartenir à l’employeur.

Néanmoins, la preuve est difficile à rapporter et la sagesse voudrait que les contrats conclus entre la société et les stylistes, dessinateurs, ou autres créatifs, soient clairs et précis sur la titularité des droits d’auteurs.

Ainsi l’article L.131-3 du Code de la Propriété Intellectuelle liste les mentions obligatoires d’une cession de droits d’auteur : « La transmission des droits de l’auteur est subordonnée à la condition que chacun des droits cédés fasse l’objet d’une mention distincte dans l’acte de cession et que le domaine d’exploitation des droits cédés soit délimité quant à son étendue et à sa destination, quant au lieu et quant à la durée.« 

La Cour de Cassation vient de rappeler ce principe dans un récent arrêt du  7 janvier 2015 (Cass. soc., 7 janvier 2015, n° 13-20224 – Madame X / EPIC Cité de la Musique).

Il ne suffit pas d’indiquer dans le contrat que toutes les œuvres créées appartiennent à la société, quand bien même toutes les prescriptions de l’article L.131-3 seraient respectées.

En effet, l’article L.131-1 du même Code prévoit que la cession globale des œuvres futures est interdite. Cette disposition rend nulle toute clause d’un contrat portant sur des œuvres qui n’existeraient pas au jour de la signature du contrat.

Par ailleurs, les clauses de rémunération étant souvent vagues, le salarié créateur aura tout loisir de saisir les Tribunaux afin de voir juger que sa rémunération aurait dû être complétée par des redevances de droit d’auteur.

Le plus opportun est donc, certes,  de prévoir dans le contrat de travail initial, la mission précise du salarié, en indiquant s’il reçoit ou non des instructions de création, prévoyant que la rémunération mensuelle est relative d’une part au travail réalisé et d’autre part à sa rémunération  d’auteur pour la cession de ses droits d’auteur. Mais il convient également, une fois par an, ou pour chaque collection de signer un avenant listant les œuvres créées et dont les droits d’exploitation sont transférés à la société.

Charlotte GALICHET
Avocat à la Cour

 

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