Liens hypertexte – Présomption de mauvaise foi pour les éditeurs de site à but lucratif !

24 octobre 2016 - DROIT D'AUTEUR

Le 8 septembre 2016, la CJUE a rendu une nouvelle décision sur les liens hypertexte renvoyant vers des œuvres protégées par le droit d’auteur.

Il s’agissait en l’espèce de la société Sanoma, éditeur du magazine Playboy, qui avait commandé des photos qui devaient paraître dans son édition du mois de décembre 2011, et pour lesquelles le photographe, M C Hermès, lui avait concédé l’autorisation à titre exclusif de les publier.

La société GS Media exploite le site GeenStijl.nl sur lequel a été publié, en octobre 2011, un article accompagné d’un lien hypertexte renvoyant vers un autre site internet, sur lequel les photos destinées au magazine Playboy étaient illégalement accessibles. Ni Sanoma, ni le photographe, n’avaient en effet autorisé cette publication.

Malgré les sommations de Sanoma de retirer l’article (dont le lien hypertexte), GS Media a publié deux articles supplémentaires accompagnés de nouveaux liens hypertexte renvoyant vers des sites sur lesquels les photos étaient, à nouveau, illégalement accessibles.

Sanoma a donc assigné GS Media sur le fondement du droit d’auteur. Le litige a été porté devant Le Cour Suprême des Pays Bas, laquelle a posé une question préjudicielle à la CJUE.

La CJUE devait alors s’interroger sur le point de savoir « dans quelles  circonstances éventuelles, le fait de placer, sur un site Internet, un lien hypertexte vers des œuvres protégées, librement disponibles sur un autre site Internet sans l’autorisation du titulaire du droit d’auteur, constitue une « communication au public » au sens de l’article 3, paragraphe 1, de la directive 2001/29 » ?

La Cour rappelle dans un premier temps qu’il est  imposé aux Etats membres de l’Union de veiller à ce que les auteurs bénéficient d’un droit exclusif d’autoriser ou d’interdire toute « communication au public » de leur œuvre (l’article 3, paragraphe 1, de la directive 2001/29).

La communication au public d’œuvre, non autorisée par son auteur, constitue donc une contrefaçon.

Surtout, il ressort de cet arrêt un nouveau régime probatoire concernant la responsabilité du créateur d’un hyperlien renvoyant vers un site sur lequel sont publiées, illégalement, des œuvres protégées par le droit d’auteur :

L’éditeur d’un site à but lucratif est présumé de mauvaise foi.
Ce dernier sera présumé ne pas pouvoir ignorer le caractère illégal de la mise à disposition des œuvres vers lesquelles son lien hypertexte renvoi. En cas de litige, l’éditeur du site devra apporter la preuve qu’il s’est assuré que son lien hypertexte ne renvoyait pas vers une œuvre illégalement publiée.

L’éditeur d’un site à but non lucratif est présumé de bonne foi.
Ce dernier est présumé ne pas pouvoir raisonnablement connaître le caractère illégal de la publication des œuvres vers lesquelles sont lien hypertexte renvoi. La charge de la preuve est ici renversée. Le titulaire des droits d’auteur devra démontrer que l’auteur du lien hypertexte ne pouvait ignorer que le contenu vers lequel son lien renvoi était protégé par le droit d’auteur.

Les éditeurs qui retirent des bénéfices du site qu’ils exploitent, avant de publier un lien hypertexte, doivent vérifier que le contenu vers lequel ce lien renvoi n’est pas illicite !

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